Faisons connaissance avec le maigre ("Argyrosomus regius") :
La courbine, appelé aussi maigre ou maigrat, de la famille des perciformes sciaenidae, est un poisson qui vit en abondance sur les côtes d’Afrique du Nord, les côtes Mauritaniennes, Sénégalaises, Marocaines, … Il remonte l’Atlantique en passant le long des côtes Portugaises et Espagnoles, longeant le Golfe de Gascogne, pour venir frayer dans la Gironde et son estuaire. C’est aux environs de fin mai qu’il se rapproche des côtes de Charente Maritime et après sa reproduction en Gironde il se disperse et peut remonter jusqu’à la pointe bretonne.
Sa taille moyenne va de 50 cms à un mètre et peut aller jusqu’à 1.80 mètres. Son poids peu alors avoisiner les 80 kgs. Ce carnassier au corps fusiforme, a des couleurs grises argentées et des reflets violacés. Ses écailles sont assez grosses et dures. Ses yeux sont de petite taille ce qui ne l’empêche pas d’avoir une bonne vision nocturne. Il possède deux nageoires dorsales, une à épine et l’autre en forme de voile. Sa nageoire caudale de bonne taille lui permet d’avoir un démarrage très vif et une vitesse de nage assez rapide. On l’appelle aussi le grogneur. Ce nom est tiré du bruit qu’il produit en période de fraye. Ce bruit sourd est produit par un muscle qui fait résonner sa vessie natatoire. Le maigre est un poisson grégaire en phase juvénile et en phase migratoire. A l’âge adulte il est plus solitaire ou vit en petit groupe. Les plus petits sujets lorsqu’ils chassent en banc sont très agressifs et voraces (plus que les bars). Ils se nourrissent plus près du fond, aussi bien en eau profonde que près des côtes en absorbant des espèces benthiques et des espèces pélagiques et quelques céphalopodes.
La maigre évolue aussi bien dans des faibles profondeurs que dans des fonds allant jusqu’à 300 mètres.
Les postes à prospecter :
Les postes à privilégier sont généralement, les tombants, les roches immergées, les épaves, les estuaires, les fosses,les cavités rocheuses, les zones de courant prononcé, l’essentiel étant que la profondeur de l’eau soit supérieure à 7 ou 8 mètres. J’ai constaté qu’il était plus actif en phase alimentaire lors des changements de courants sur les détours de marée haute et de marée basse. Dans notre région nous avons la chance d’avoir un bon passage de maigres. On le trouve sur toutes les côtes de Charente Maritime, autour de l’île d’Oléron, de l’île de Ré, les pertuis, aux embouchures de la Charente et de la Seudre.
La technique :
On peut pêcher le maigre aux leurres souples en technique verticale, jigs et cuilleres, aux poissons vivants ou morts (mulet, seiche, sardine et autre petit poisson), dans des profondeurs beaucoup plus importantes pouvant aller jusqu’à une cinquantaine de mètres. Pour localiser les zones idéales, il suffit d’analyser avec soin une carte marine et de repérer les endroits qui se prêtent à l’évolution de cette pratique. Pour avoir de bons résultats et être certain de se placer sur le bon terrain, il convient de maîtriser parfaitement l’utilisation de votre sondeur et de votre GPS. Pour cette technique, il est important de contrôler ses dérives et de bien placer son bateau. A mon sens, il est indispensable de conjuguer l’action des deux appareils : l’un vous indiquera si la profondeur est correcte, décèlera les obstacles et les poissons évoluant sur le fond, et l’autre vous permettra de savoir exactement votre position avec la cartographie et d’effectuer vos dérives avec une grande précision. Les grandes profondeurs se situent en général loin de la côte et il est difficile de prendre des repères visuels. Le GPS a donc là toute son importance.
Il ’existe des périodes plus ou moins propice pour pêcher le maigre. Cependant, je pense que pendant les mois de juin, juillet, août, septembre restent les mois les meilleurs ; octobre et novembre les maigres sont toujours là mais un peu plus dispersés.
Les leurres et le matériel :
Les leurres souples tels que les Shads semblent prédestinés pour la pèche du maigre : la forme de leur nageoire caudale émet des vibrations lors du maniement et agit directement sur la ligne d’agressivité latérale du maigre (cette petite ligne noire est visible sur le corps de tous les maigres, elle part de derrière les ouies et se prolonge jusqu’à la nageoire caudale. Elle se situe environ à la moitié du corps sur les flancs du poisson). La texture de ces leurres doit être assez souple. Le maigre attaque avec agressivité. Sa bouche étant assez petite mais pourvue de dents acérées, il tue ses proies avant de les avaler.
Leur taille varie entre 12 cms et 17 cms pour les plus gros.
Les coloris proposés sont très variés. Ils ont leur importance dans les faibles profondeurs et dans les eaux très claires. Votre choix doit aussi être guidé par le genre de nourriture qui se trouve dans la zone où vous évoluez et que le maigre chasse (anchois, sardines, lançons, seiches, …). Dans les eaux troubles ou chargées, le blanc et les couleurs vives et agressives (orange, rouge, toutes les couleurs fluorescentes et phosphorescentes) donnent de bons résultats. Au-delà de 20 mètres d’eau, la photosynthèse ne se faisant plus, les couleurs ont moins d’importance (le blanc semble cependant sortir du lot).
Le poids des têtes plombées a une très grande incidence dans cette pratique et doit varier en fonction da la vitesse de la dérive, du courant et de la profondeur d’eau.
Les formes de têtes plombées peuvent être différentes : forme sabot, boule, triangulaire ou olive. Les hameçons doivent être forts de fer et bien pointus. Les cannes en Carbonne sont d’action de pointe rapide et progressive. Leur longueur se situe entre 1.80 et 2.40 mètres (en 1.80 m, privilégiez une monobrin). Le moulinet de taille 4000 avec un frein progressif fera un bon compromis avec ces cannes courtes et en adéquation avec le poids des têtes plombées. Il faut le garnir de tresse d’un diamètre de 15 à 20/00 et fixer un bas de ligne en fluorocarbonne de 45 à 60/00 d’une longueur d’un mètre. Une agrafe n°4 Cross lock complètera votre montage.
La canne doit être maintenue parallèlement à la surface de l’eau pour pouvoir effectuer des ferrages efficaces, appuyés et de grande amplitude. Cette position vous évitera de manquer vos poissons au ferrage. La touche du maigre est très rapide, soudaine et surprenante. Une fois piqué, il donne de nombreux coups de tête et pour les plus gros sujets un démarrage foudroyant. Le réglage du frein du moulinet doit être méticuleux : un frein trop fort et on risque de déchirer la bouche du poisson. C’est un poisson qu’il ne faut pas trop brider avec sa canne. Il se travaille lentement. Après le rush de départ et une fois décollé de quelques mètres, la patience est maître mot ! Sur les gros sujets, le combat peut durer plusieurs dizaines de minutes.
Vos montages doivent être parfaits. La pose d’un leurre souple sur une tête plombée a une certaine importance. Pour obtenir une nage naturelle et éviter que le leurre ne se déporte par rapport à la tête plombée, il faut que la tête plombée soit piquée bien au centre du leurre et que la courbure de l’hameçon ressorte dans l’axe du dos à environ un tiers de la longueur du leurre. Les deux autres tiers permettent d’avoir une bonne souplesse ce qui accentue les vibrations de la nageoire caudale. N’hésitez pas à l’aide d’une paire de ciseaux de couper la tête de vos leurres souples pour bien faire épouser la forme de la tête plombée. Un point de colle à prise rapide solidarisera l’ensemble. Sur des gros shads, vous pouvez rajouter un hameçon triple sur le dernier tiers du leurre relié par un morceau de tresse de fort diamètre. Pour effectuer le montage de cette empile, il suffit de prendre un morceau de tresse de fort diamètre (40/100), de faire un nœud « palomard » pour y attacher le triple et d’effectuer une boucle de 4 à 5 cms de long à l’autre extrémité. Ce montage doit être fixé sur le leurre souple de la manière suivante : faites un nœud coulant avec la boucle, passez-la autour de l’œillet de la tête plombée, serrez fortement, faites un tour mort autour de la courbure de l’hameçon et piquez une branche du triple sur le dos du leurre. Bien entendu la longueur de votre montage est à adapter à la longueur de votre leurre souple.
Le maniement :
Le maniement est simple mais très tactile. Une fois le leurre accompagné de sa tête plombée descendu au fond et non jeté, il faut prendre contact, se mettre en tension et remonter le leurre par une petite tirée verticale (entre 50 cms et un mètre maximum), contrôler la descente qui se fait lentement. Vous pouvez également essayer de le remonter en faisant des petites saccades. La touche intervient à 98% à la descente du leurre vers le fond et elle est très franche. Bien maîtriser la redescente du leurre permet aussi de sentir les touches discrètes de poissons chipoteurs. Au fur et à mesure de votre dérive selon le courant et le vent, votre leurre va se décaler et se décoller du fond. Vous devez alors ouvrir le pick-up de votre moulinet pour reprendre contact avec le fond et renouvelez l’opération dès que vous ne sentez plus le fond. Lorsque le leurre est à plus de 20 mètres du bateau ou que votre tresse est trop à l’oblique, remontez entièrement votre ligne et redescendez-la à l’aplomb. Sur des poids légers, la petite astuce pour être sûr que votre leurre souple est bien au fond consiste à laisser couler la tête plombée et attendre que la bannière de votre tresse se détende. La tresse doit se poser à plat sur l’eau. Une fois cette action effectuée, récupérez l’excédent de tresse, prenez contact et commencer à pêcher.
Lorsque les poissons sont peu mordeurs, ils viennent souvent taper le leurre une fois et si vous ferrez dans le vide, sachez que le prédateur, tant qu’il n’est pas piqué, est toujours aux aguets. Reprenez alors très rapidement contact avec le fond en continuant votre maniement : vous avez une grande chance de le reprendre.
Il n’est pas rare de pêcher plusieurs maigres de petite taille (40 à 60 cms) sur le même poste. Par contre, si les loupés ou les décrochés sont trop nombreux, les bancs ont tendance à se disperser assez rapidement sans pour cela partir trop loin. Quant aux grands sujets, beaucoup plus solitaires, il est assez exceptionnel d’en prendre plusieurs sur le même poste.
La pêche et la compréhension de ce poisson vont vous apporter une très bonne connaissance du terrain et vous faire acquérir un bon sens tactile du maniement des leurres. Elle permet de prospecter une multitude de postes, d’endroits différents et d’être sans cesse en quête de découverte. Dans l’espoir d’avoir la chance de pêcher un poisson record et de garder un souvenir inoubliable d’un combat jamais gagné d’avance, je vous souhaite à tous une très bonne saison 2007.
PS : pour votre gouverne, la quantité ne fait pas la qualité !
Didier COURTOIS